Stress, santé mentale et réseaux sociaux : malédiction ou guérison ?

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Dans cet article, nous nous penchons sur les niveaux de stress subis par la génération Z et Y. Nous explorons comment les réseaux sociaux jouent un rôle central dans l'exacerbation du stress et nous découvrons les mécanismes d'adaptation employés par nos jeunes générations.

  • 86.3% des jeunes consultent les réseaux sociaux au moins une fois toutes les deux heures

Ces dernières années, parler de santé mentale est de plus en plus encouragé. Les progrès dans ce domaine sont en grande partie pilotés par les jeunes générations (soit le groupe cible de l'EMC de cette année) qui semblent déterminées à éradiquer les tabous entourant les conflits émotionnels.

Dans cette optique, nous avons posé à nos répondants une série de questions sur le stress qu'ils subissent, sur les causes de ce stress et sur les moyens déployés pour y faire face.

Pour la première fois cette année, nous explorons également l'impact des réseaux sociaux sur la santé mentale.

Quel est votre niveau de stress ?

Dans l’étude de cette année, 46,7 % des générations Y et Z ont déclaré se sentir souvent ou toujours stressés, soit une augmentation de plus de 6 % par rapport à l'année précédente. Ce chiffre reste inférieur à nos données de 2021, où plus de la moitié des répondants s'étaient déclarés souvent ou toujours stressés (50,1 %). Mais 2021 est derrière nous et le fait que nous nous rapprochions des niveaux de stress observés lors des confinements mondiaux est source de préoccupation.

Le stress varie également selon les générations. Nos données indiquent que les jeunes répondants sont généralement plus stressés que leurs aînés, plus de la moitié des membres de la génération Z se sentant souvent ou toujours stressés (51,7 %), contre seulement 44 % de la génération Y. Cela peut s'expliquer par le fait que certaines causes de stress, telles que l'augmentation du coût de la vie due à l'inflation, affectent de manière disproportionnée les personnes qui perçoivent des salaires bas.[3] Cela pourrait avoir un impact important sur la génération Z, qui est plus susceptible d’occuper des postes temporaires ou à temps partiel (plus incertains, moins bien rémunérés) que leurs homologues de la génération Y.[4]

Cependant, quelle que soit la génération, la principale cause de stress. chez les jeunes est toujours la même : les problèmes financiers.  Plus d'un quart des répondants qui se disent souvent ou toujours stressés citent les problèmes financiers comme première cause de ce stress (26,2 %), suivis par les problèmes professionnels (20,4 %) et l'incertitude quant à l'avenir (18,4 %).

Curieusement, ce sont les problèmes mondiaux tels que le changement climatique et la guerre qui ont suscité le moins d'inquiétude chez les jeunes, puisque seulement 6,4 % des répondants stressés ont déclaré qu'il s'agissait de leur principale préoccupation. Ceci est particulièrement surprenant, étant donné les preuves documentées de l'anxiété suscitée par les problèmes environnementaux chez les jeunes.[5] Cependant, même si les jeunes sont consternés par les instabilités mondiales de ce type, il semble que d'autres problèmes, plus personnels, soient à l'origine d'un stress plus important.

En règle générale, comment vous sentez-vous ?

L'impact des réseaux sociaux

La façon dont nous communiquons, rétréci notre univers et redéfini notre comportement. Contrairement à leurs parents, les membres de la génération Y et de la génération Z ont grandi immergés dans les réseaux sociaux, ces derniers se souvenant à peine d'une époque où ils n’existaient pas.

Cependant, une multitude d'études font état de l'impact délétère des réseaux sociaux sur le stress[9], l'image de soi et le bien-être : des tendances qui ont même été documentées dans des séries télévisées de premier plan telles que Black Mirror sur Netflix. Les réseaux sociaux sont-ils une arme à double tranchant pour les jeunes ?

L'écrasante majorité (86,3 %) de nos répondants dans le monde entier a déclaré consulter les réseaux sociaux au moins une fois toutes les deux heures, et plus d'une personne sur dix (11,9 %) vérifie son application toutes les dix minutes. Comme on pouvait s'y attendre, la génération Z utilise les réseaux sociaux un peu plus fréquemment que la génération Y, bien que l'utilisation soit élevée dans les deux groupes.

Et bien qu'ils utilisent davantage les réseaux sociaux, les membres de la génération Z en ont une perception plus négative que leurs aînés. Ainsi, 27,2 % des répondants de la génération Z ont estimé que les réseaux sociaux avaient un impact délétère sur leur santé mentale, contre seulement 21,4 % de ceux de la génération Y.

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  • Plus d'1 jeune sur 10 regarde son téléphone toutes les 10 minutes.

L'une des corrélations les plus remarquables de cette année concerne l'utilisation des réseaux sociaux et le niveau de stress autodéclaré. Les jeunes qui se disent « toujours stressés » ont tendance à consulter les réseaux sociaux plus fréquemment que les autres groupes, plus de la moitié d'entre eux (55,2 %) le faisant au moins toutes les 30 minutes. En revanche, les personnes qui se disent « neutres » ou « plutôt calmes » les consultaient moins fréquemment, à raison d’une fois par heure ou une fois toutes les deux heures, respectivement.

Curieusement, les données aberrantes indiquent que des personnes se déclarant « toujours calmes » consultent également les réseaux sociaux plus fréquemment que la norme, ce qui va à l'encontre de la tendance générale selon laquelle un niveau de stress plus élevé est corrélé à une utilisation plus fréquente des réseaux sociaux. L'une des explications possibles est que si les réseaux sociaux augmentent l'anxiété de nombreux jeunes, ils peuvent en fait apporter à d’autres une certaine tranquillité d'esprit.

Cependant, de nombreux Chinois interrogés ne considèrent pas que leur intérêt pour les applications soit préjudiciable. Avec 44,9 %, la Chine compte le plus grand nombre de personnes n'ayant pas ressenti d'effets négatifs liés à l'utilisation des réseaux sociaux, soit plus de 13 % de plus que la France, qui arrive en deuxième position. Cela peut s'expliquer par le fait que la Chine interdit l'accès à des sites tels qu'Instagram, X (anciennement Twitter), Facebook et YouTube, au profit de ses propres canaux comme Douyin, WeChat et Weibo ; ayant souvent été plus rapide à réglementer les aspects addictifs de ses propres applications à l’inverse de ses voisins occidentaux.[10]

En termes de secteur, 63,9 % des personnes travaillant dans l'édition consultaient les réseaux sociaux au moins toutes les 30 minutes, ce qui est plus élevé que dans n'importe quel autre secteur d'emploi. Cela s’explique facilement puisque c’est un secteur qui connaît une transformation numérique bien documentée.[11] À l'autre extrémité, le personnel militaire est celui qui consulte le moins souvent les applications sociales : 17,5 % d'entre eux ne les utilisent pas plus d'une fois par jour, fait peu surprenant étant donné les restrictions que les armées peuvent imposer sur l'utilisation des téléphones pendant le service.

Résoudre le problème du stress

Jusqu'à présent, nous avons examiné les niveaux de stress que les membres de la génération Y et de la génération Z subissent dans le monde entier, les causes qu'ils citent pour expliquer ce stress et l'impact de l'utilisation des réseaux sociaux sur la santé mentale. Mais que faire pour y remédier ? Quelles mesures les jeunes prennent-ils pour lutter contre le stress ?

Pour les répondants qui nous ont dit avoir connu une période de stress qui les a empêchés de mener à bien leurs activités habituelles, nous avons demandé comment ils avaient résolu le problème. Globalement, l'activité physique (45,3 %) et les discussions avec les amis et les membres de la famille (44,1 %) restent les deux résolutions les plus populaires, tout comme en 2022.

Fait notable, les membres de la génération Z sont 7 % de moins par rapport à la génération Y à déclarer que l'exercice physique leur est utile lorsqu'ils traversent une période de stress mental. L'évaluation par marché révèle des différences encore plus marquées dans les réponses à cette question. Les Indiens sont presque trois fois plus nombreux que les Japonais (22,6 %) à affirmer que l'activité physique a eu un effet bénéfique sur leur santé mentale (67,4 %).

Fait encourageant pour les fournisseurs de solutions de santé et de bien-être, plus d'un quart des jeunes ont trouvé que les applications dédiées à la santé mentale les aidaient à faire face à leurs angoisses (26,3 %).

Par ailleurs, un nombre plus faible de répondants à l'enquête de cette année a déclaré trouver la thérapie cognitivo-comportementale (TCC) utile pour faire face à une crise de santé mentale (21,8 %) par rapport aux données de l'année précédente provenant des mêmes générations (26 %). Si cette tendance se poursuit à l'avenir, elle pourrait indiquer que la TCC perd de sa popularité à titre de traitement des problèmes de santé mentale, ce qui avait été évoqué ces dernières années.[12]

Au cours de cette période, lesquels de ces supports avez-vous trouvé utiles ? Fig 27. Les moyens les plus populaires pour lutter contre le stress (2022 vs 2023)

À retenir

  1. Les questions financières sont en moyenne la principale cause de stress pour les jeunes, 26,2 % d'entre eux estimant qu'il s'agit de leur principal source d'inquiétude.
  2. La majorité des jeunes (86,3 %) consultent les réseaux sociaux au moins toutes les deux heures, et plus d'un sur dix le fait toutes les dix minutes (11,9 %). Cependant, près d'un quart des personnes interrogées déclarent que cela a un impact délétère sur leur santé mentale.
  3. L'activité physique (45,3 %) reste la solution la plus populaire chez les jeunes pour faire face au stress, tandis que les discussions avec les amis et la famille (44,1 %) apportent également un réconfort important.

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Références

[3] Office for National Statistics. (2022). Inflation and cost of living for household groups. [Online]. Available at: https://www.ons.gov.uk/economy... inflationandthecostoflivingforhouseholdgroups/october2022 [Accessed 20 June 2023]

[4] Marketplace / Edison Research. (2018). The Gig Economy. [Online]. Available at: https://www.edisonresearch.com/wp-content/uploads/2019/01/Gig-Economy-2018- Marketplace-Edison-Research-Poll-FINAL.pdf. [Accessed 20 June 2023].

[5] Hickman, C. et al, (2021). Climate anxiety in children and young people and their beliefs about government responses to climate change: a global survey. [Online]. The Lancet Planetary Health (Vol 5, Issue 12). Available at: https://www.sciencedirect.com/... article/pii/S2542519621002783

[6] Centre for Addiction and Mental Health. Mental Illness & Addiction Index. [Online]. Available at: https://www.camh.ca/en/health-... stress [Accessed 20 June 2023]. 

[7] Mental Disorders fact page (2022). World Health Organization. [Online] Available at: https://www.who.int/news-room/... [Accessed 20 June 2023].

[8] Gaitz, C. (1980). Diagnosing mental illness in the elderly. [Online]. National Library of Medicine. Available at: https://pubmed.ncbi.nlm.nih.go... [Accessed 20 June 2023]. 

[9] Kuss, D. & Griffiths, M. (2011). Online Social Networking and Addiction—A Review of the Psychological Literature. Int. J. Environ. Res. Public Health. 8(9), pp.3528-3552. [Online]. Available at: https://www.mdpi.com/1660-4601... [Accessed 19 June 2023].

[10] Zeyi, Y. (2023). How China takes extreme measures to keep teens off TikTok. [Online]. MIT Technology Review. Available at: https://www.technologyreview.c... [Accessed 21 June 2023].

[11] McGlone, A. & Fazil, A. (2021). Digital Transformation of the Publishing Industry. [Online]. London Strategic Consulting. Available at: https://www.londonstrategiccon... [Accessed 21 June 2023]

[12] Johnsen, T. J., & Friborg, O. (2015). The Effects of Cognitive Behavioral Therapy as an Anti-Depressive Treatment is Falling: A Meta-Analysis. [Online]. Psychological Bulletin. Available at: http://dx.doi.org/10.1037/bul0...